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Le socle de la construction des pays

Le socle de la construction des pays

 

Le socle de la construction des pays

Un pays est la prairie de l’enfance, l’aire de jeux de notre jeunesse, le lieu de rencontre de nos proches, de nos amis et de nos bien-aimés. L’amour de son pays est ancré dans les âmes, c’est naturel… Même si pour un étranger cela peut paraitre insignifiant ou sans valeur, il n’en reste pas moins qu’il est à nos yeux le meilleur endroit sur terre.

Quel que soit ce qu’on a pu y rencontrer et y enduré, on a toujours pour son pays un rang bien particulier dans notre cœur.

Quitter son pays est une catastrophe. Il a été rapporté du Prophète () lorsque les polythéistes l’ont expulsé de la Mecque qu’il s’est tenu debout et a regardé derrière lui avant de faire ses adieux à la ville en disant : « Par Allah, je sais bien que tu es la meilleure contrée sur terre et la plus aimée d’Allah. Et si on ne m’avait pas obligé à partir je ne serais jamais sorti. » Rapporté par Tirmidhi.

Le socle de construction des pays :

Il ne fait aucun doute qu’édifier un pays, le mettre sur pied, le faire fleurir, l’amener à un rang honorable au sein des nations, tout cela n’est pas chose aisée ni ne se fait entre la soirée et la matinée. Pour ce faire, il faut fournir des efforts, sacrifier des vies, dépenser de l’argent, détenir du savoir, mettre en place des stratégies. Tout cela avec un objectif sain et une intention sincère, et une grande motivation… De même que l’édification d’un pays ne peut se faire qu’en mettant en place une stratégie parfaite et une action efficace en mettant en œuvre tous les moyens pour y arriver.

Et il existe des piliers et des idées fortes qui sont indispensables à la réalisation de cette tâche et au succès d’une société. Une nation ne peut s’élever sans la présence de ces facteurs. Les principaux sont les suivants :

Premièrement : le savoir :

C’est la première arme nécessaire à l’édification des sociétés et même des civilisations… Une société n’a pas plus besoin d’une chose que celle-là, pour savoir, apprendre et enseigner.

C’est par le biais du savoir que l’homme peut découvrir les secrets de l’univers et les lois de la nature pour les mettre à son service et au service de sa société. C’est par le biais du savoir que l’on construit une vie noble et agréable, que l’on vient à bout de l’illettrisme et de l’ignorance, de la pauvreté, de la faim et des maladies. C’est par le biais du savoir que les gens peuvent prendre connaissance de leurs droits et de leurs devoirs. Et se débarrasser des crises et des problèmes. C’est aussi par le savoir et par la foi qu’un homme peut s’élever et élever un groupe d’hommes. Allah, exalté soit-Il, dit :

« Allah élèvera le rang de ceux d’entre vous qui ont cru et reçu la science. » (Coran 58/11).

L’Islam et le Coran appellent les musulmans au savoir. Le premier verset du Coran qui a été révélé fut un appel à la connaissance et au savoir qui ne peut s’acquérir que par la lecture et l’écriture :

« Lis, par le Nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé l’Homme d’une adhérence. Lis ! Ton Seigneur est le Très Noble, qui a enseigné par le calame, qui a enseigné à l’Homme ce qu’il ne savait pas. » (Coran 96/1-5).

L’objectif de ce propos n’est pas de désigner uniquement le savoir religieux. Mais il s’agit de parler de tout savoir utile et profitable qui contribue à l’avancée de la civilisation, à l’enrichissement des connaissances, au renforcement de la société… Qu’il s’agisse des savoirs religieux ou des savoirs matériels et expérimentaux comme la médecine, l’ingénierie, l’économie et le commerce. Ou encore les sciences humaines et sociales.

Allah a désigné ces savoirs comme des obligations solidaires qui incombent à au moins une partie de la communauté. C’est pour cette raison qu’Allah a enjoint Son Prophète à lui demander davantage de savoir et à chercher protection contre un savoir inutile. Il a donc invoqué Allah ainsi : « Ô, Allah, je cherche protection auprès de toi contre un savoir inutile. » Rapporté par Mouslim.

C’est par le biais du savoir qu’il nous est possible de semer ce qu’on mange, de fabriquer les vêtements qu’on porte, de produire nos médicaments, nos armes et nos besoins. Sans le faire, nous resterions dépendants d’autrui, à gémir sous leurs pieds et à vivre sous leur clémence. Et comme le dit un poète :

Le savoir élève une maison sans qu’elle n’ait de piliers

Et l’ignorance détruit la maison noble et pleine de fierté

Deuxièmement : la justice :

 Comme le dit l’adage : la justice est le socle de la royauté… C’est par justice qu’ont été établi les cieux et la terre… C’est une règle absolue qui est reconnue autant par les élites que par les gens de la masse. Elle est clairement établie, la réalité de la vie l’atteste de même que l’histoire. C’est une loi divine qui régit le monde. Et il n’y a pas de différence à ce sujet entre un pays musulman ou mécréant.

Allah, exalté soit-Il, dit :

« Pesez équitablement sans jamais frauder. » (Coran 55/9).

« Allah prescrit l’équité, la bonté et la charité envers les proches » (Coran 16/90).

Le Messager d’Allah () a dit : « Prenez garde à l'injustice, car l'injustice se traduira en ténèbres au Jour du Jugement. » Rapporté par Mouslim.

Celui qui fait de la justice la base de son pouvoir, il le renforcera et son état y gagnera, même s’il est mécréant. Et inversement, celui qui construit son état sur l’injustice alors il aura trahi le dépôt qu’il lui a été confié et négligé les droits de chacun et son état ne subsistera pas, même s’il est musulman.

Ibn Taymiyya a dit : « Allah fait triompher un état juste même s’il est mécréant et il ne soutient pas un état injuste même s’il est musulman. »

Ibn Khaldun a intitulé un des chapitres de son ouvrage Al-Muqaddima, comme suit : Chapitre : l’injustice est une prémisse à la destruction de la société. Il y a expliqué que si l’injustice se répand dans un pays, elle le détruit et affecte la situation des gens.

Un des préfets de Omar ibn Abd Al-Aziz qui était responsable de l’administration d’une des contrées du califat lui envoya cette lettre :

« Ceci étant dit :  la ville est ravagée, si le calife veut bien nous envoyer de l’argent pour la rénover, qu’il le fasse !? »

Ce à quoi le calife lui répondit :

« Ceci étant dit : j’ai bien compris la teneur de ton courrier. Et ce que tu y as dit au sujet de la ville qui est ravagée. Quand tu liras mon courrier, alors protège la ville en appliquant la justice et nettoie les rues de l’injustice. C’est ainsi que tu rénoveras la ville. »

De même, le préfet de la région de Khurâsân lui écrivit :

« Les gens de cette contrée sont mauvais. Rien ne peut les réformer si ce n’est l’épée et le bâton. Est-ce que le calife peut m’autoriser à y recourir. »

Il lui répondit :

« Ceci étant dit : j’ai bien reçu ton courrier dans lequel tu expliques que les gens de Khurâsân sont mauvais et que rien ne peut les réformer si ce n’est l’épée et le bâton. Mais tu mens. Au contraire, ce qui peut les réformer c’est la justice et la vérité. Alors mets-les en pratique avec eux. »

La justice est une valeur universelle qui est requise dans toutes les situations et de la part de chacun.

Elle est requise d’un gouverneur avec ses administrés, et s’il la met en pratique il lui est promis de faire partie des sept catégories de gens qui seront sous l’ombre d’Allah le jour où il n’y aura d’ombre que la Sienne. Et la justice est aussi requise de la part des administrés entre eux. Allah, exalté soit-Il, dit :

« Vous qui croyez ! Agissez en toute justice et rendez témoignage dans le seul but de plaire à Allah, même si vous devez pour cela témoigner contre vous-mêmes, vos père et mère ou vos proches parents. » (Coran 4/135).

« Vous qui croyez ! Pratiquez la justice dans le seul but de plaire à Allah et soyez les témoins les plus impartiaux. Et que votre ressentiment à l’encontre de vos ennemis ne vous pousse pas à les traiter injustement. Soyez au contraire justes envers eux. Voilà une manière d’agir plus conforme à la piété. » (Coran 5/8).

Le sens du verset est le suivant : que votre haine pour certaines personnes ne vous conduise pas à faire preuve d’injustice envers eux. Au contraire, le musulman se doit d’être juste même avec ceux qui s’opposent à lui.

La justice est un élément indispensable à l’édification d’un pays et à sa survie. L’injustice est une prémisse à sa perdition et son anéantissement. Cette notion a été clarifié par le Prophète () lorsqu’il dit à Usâma ibn Zayd, lorsque celui-ci était venu le voir en voulant intercéder pour une femme de la tribu des Makhzûm qui avait volé. Il lui dit : « Intercèdes-tu en sa faveur alors qu’il s’agit d’une peine prescrite par Allah le Très Haut ?! » Puis il se leva et s’adressa aux musulmans en ces termes : « Ce qui a entrainé la perte de ceux qui ont vécu avant vous est que lorsqu’un notable parmi eux commettait un vol, ils le laissaient aller, mais si un faible commettait le même délit, ils lui infligeaient la peine légale. Par Allah ! Si Fâtimah, la fille de Mohammed, commettait un vol, je lui ferais couper la main. » Rapporté par Boukhari et Mouslim.

 

 

Troisièmement :la sécurité :

Vivre en sécurité est un des objectifs les plus importants de la vie. C’est une des nécessités des sociétés humaines. L’intérêt des gens et des pays ne peut se réaliser sans que la sécurité ne règne. Les objectifs et les aspirations de la société ne peuvent être atteints que si la sécurité est omniprésente. Les gens ne peuvent être heureux et vivre en paix sans se sentir en sécurité. Sans sécurité, pas de bonheur ni d'abondance ni de prospérité pour les pays. En lieu et place, on retrouvera la peur et la faim. L’écroulement de la société et son anéantissement apparaitront.

La sécurité est la quête de tout citoyen sincère envers son pays. Comme l’a dit Ibrahim (‘Alayhi Al-Salâm) :

« Et quand Abraham supplia : "Ô mon Seigneur ! Fais de cette cité un lieu de sécurité, et fais attribution des fruits à ceux qui parmi ses habitants auront cru en Allah et au Jour Dernier" » (Coran 2/126).

C’est un bienfait divin pour ceux qui en ont été comblé :

« A cause du pacte des Qoraïsh, de leur pacte [concernant] les voyages d'hiver et d'été. Qu'ils adorent donc le Seigneur de cette Maison (la Kaaba) qui les a nourris contre la faim et rassurés de la crainte. » (Coran 106/1-4).

« N’ont-ils donc pas vu que Nous avons ménagé (pour eux) une enceinte sacrée et sûre, alors qu’autour d'eux les gens sont arrachés (à leurs vies et à leurs biens) ? Croiront-ils toujours au faux et nieront-ils encore les bienfaits d'Allah ? » (Coran 29/67).

C’est un bienfait sur terre. Le Messager d’Allah () a dit : « Quiconque se retrouve au matin en sécurité, en bonne santé et disposant de la subsistance de sa journée, c’est comme si le monde entier lui avait été donné. » Rapporté par Tirmidhi et Ibn Mâjah.

Partant, la législation islamique a institué parmi ses plus grandes règles et finalités générales, la préservation de la sécurité publique, ceci par le biais de la préservation des cinq nécessités vitales (reconnues par les savants comme étant les finalités suprêmes de la religion) et sans la préservation desquelles la vie des gens ne peut suivre son cours convenablement. Il s’agit de la préservation de la religion, de la raison, de la vie, de l’honneur et des biens.

Quatrièmement : l’union et l’unité des rangs :

Allah, exalté soit-Il, dit :

« Restez tous fermement attachés à la religion d’Allah sans jamais vous diviser. Souvenez-vous des faveurs d’Allah envers vous lorsque, ennemis les uns des autres avant l’islam, Il a uni vos cœurs si bien que, par Sa grâce, vous êtes devenus frères. » (Coran 3/103).

Allah nous a intimés l’ordre de nous unir et de nous attacher à la religion. C’est en restant uni que la vie des gens pourra suivre son cours convenablement et qu’ils obtiendront ce qui relève de leur intérêt mondain. Ils pourront bénéficier par la concorde qui les lie de bienfaits qu’il n’est pas possible de recenser, notamment à travers l’entraide au bien et à la piété. A l’inverse, la désunion et l’animosité affecteront leur organisation et rompront leurs liens. Chacun agira selon ses propres passions ce qui conduira à des méfaits d’ordre général [L’exégèse de Al-Sa’dî avec quelques adaptations].

Lorsque le Messager d’Allah () a émigré à Médine, il a établi des liens de fraternité entre les musulmans. Il a également rédigé un document devant régir les relations entre les différents groupes résidant dans la ville qui n’étaient pas musulmans, les juifs et les polythéistes. Ceci afin de garantir qu’il n’y ait pas de conflit et de problèmes dans le but d’organiser la vie en société, en paix et en harmonie, en solidarité, sous la protection d’un même pays.

Lorsqu’apparut un début de conflit entre les Muhâjirûn et les Ansâr, dans le récit qui est bien connu, il s’empressa de les exhorter et de les rappeler à la raison en leur disant : « Laissez ces allégations, elles sont puantes. » Rapporté par Boukhari et Mouslim.

Il appelait plutôt à tout ce qui pouvait contribuer à renforcer les liens d’amour et d’harmonie entre les musulmans. Selon Abou Horayra (qu’Allah soit satisfait de lui) le Messager d’Allah () a dit : « Vous n’entrerez au Paradis que lorsque vous aurez la foi et vous n’aurez véritablement la foi que lorsque vous vous aimerez les uns les autres. Voulez-vous que je vous indique une chose qui fera naître de l’amour entre vous ? Saluez-vous les uns les autres. » Rapporté par Mouslim.

L’union, l’unité, l’harmonie, l’absence de divergence : tout cela constitue les pas les plus importants sur le chemin de l’édification des pays et à leur fleurissement.

Cinquièmement : édifier les hommes :

C’est l’axe principal de tout véritable progrès et de sa pérennité. On doit construire un édifice d’hommes avant de construire un édifice de pierres. En effet, une construction n’a aucune valeur si l’homme est détruit… Il n’y a aucun intérêt à construire des bâtisses si les hommes qui sont censés les habiter sont détruits… Il faut absolument construire avant tout un citoyen de façon globale et complète : sur les plans de la croyance, des actes, du comportement, physiquement, culturellement, socialement, de façon à ce qu’il puisse être utile à lui-même et à son pays.

Et c’est bien ce qu’a fait le Messager d’Allah () avec ses Compagnons. Il les a éduqués en fonction des dogmes authentiques, de principes droits, de comportements louables, de paroles fermes, d’actes corrects. Les Compagnons étaient incontestablement les meilleurs des hommes.

L’histoire de la muraille de Chine :

Lorsque les Chinois des temps anciens avaient souhaité vivre en paix, ils ont construit la muraille de Chine en pensant que personne ne pourrait la surmonter tant elle était haute. Mais à peine cent ans après l’avoir construite, ils subirent des invasions à trois reprises ! Et à chaque fois, les groupes ennemis qui arrivaient par voie terrestre n’avaient même pas besoin de détruire la muraille ou la surmonter… Chaque fois qu’ils se présentaient devant la muraille, ils donnaient un pot de vin au gardien puis entraient par la porte.

Les Chinois se sont occupés à construire la muraille mais ont oublié de construire le gardien !

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